Biologie reproductive des espèces étudiées

Cette publication propose une description succincte des connaissances scientifiques sur la biologie de la reproduction des cinq espèces cultivées étudiées : bananier, cacaoyer, cocotier, manioc et palmier à huile. Les textes sont proposés en versions française et anglaise.

Il était initialement prévu d'inclure ces informations dans le texte de l'article :"Assessment of farmers’ traditional and botanical knowledge regarding the reproductive biology of five crops (banana, cassava, cocoa, coconut, oil palm): Typology of farmers’ perceptions in Côte d’Ivoire" , mais pour des questions de longueur de texte, ceci a été finalement abandonné. Pour mémoire, on trouvera en fin de ce post le dernier texte, plus court, qui était prévu dans l'article.

Le bananier - Banana tree
Par Roland, version du 21/04/2016 - à Valider
Le bananier est une grande plante herbacée originaire du Pacifique Sud. Il existe deux types principaux de banane, les "bananes dessert" souvent sucrées et consommées crus, et les «plantains» produisant des fruits féculents souvent cuits avant de les manger. Les cinquante espèces connues de banane appartiennent tous au genre Musa. Les bananes de type sauvage produisent des graines dures à l'intérieur de leurs petits fruits, qui sont souvent non comestibles pour les humains. Au fil des siècles, les bananiers de type sauvage ont produit des descendances mutantes, qui produisaient des fruits avec de moins en moins de graines. Ces mutants sont devenus les ancêtres des bananes domestiqués. Les premiers humains ont commencé à reproduire la plante en utilisant les rejets qui apparaissent à la base des plantes. Des croisements accidentels entre des espèces plus ou moins distantes ont produit des variétés de plus en plus stériles et produisant de moins en moins de graines (Perrier, 2009). De nos jours, les bananiers domestiques sont propagés de façon asexuée, comme des clones, génétiquement similaires à la plante ils sont originaires. Du point de vue botanique, si l'on accepte d'appliquer le terme «père» pour les plantes, on peut dire que la mère et le père d'un bananier est le même individu cloné. Un bananier n'est ni femelle, ni mâle, parce qu'il a perdu sa capacité à se reproduire sexuellement.


Banana is a huge herbaceous plant originating from the South Pacific. There are two main kinds of banana, the “dessert bananas” often sweet and consumed uncooked, and the “plantains” producing starchier fruits often cooked before eating. The fifty known species of banana all belong to the genus Musa. The wild-type bananas show hard seeds inside their little fruits, mostly inedible to humans. Occasionally, wild-type bananas have produced mutant offspring, which bore seedless fruits. These mutants became the ancestors of domesticated bananas. Early humans started to reproduce the plant using the root offshoots, or “suckers,” which appear at the base of the plants. Accidental hybridization between more or less distant relative species produced increasingly sterile and seedless cultivars (Perrier, 2009). Nowadays, the domestics bananas, asexually propagated as clones, are genetically similar to the plant they originate. So, from the botanic point of view, if we accept to apply the term “father” to plants, we can say that the mother and the father of a banana plant is the same and identical to itself. A banana plant is neither female and neither male, because it lost its capacity of sexual reproduction.
Reference
Perrier, Xavier. "Combining biological approaches to shed light on the evolution of edible bananas." Ethnobotany Research and Applications 7 (2009): 199-216.

Le cacaoyer- Cocoa tree
Par R.Bourdeix, 22 Avril 2015 - version à valider.
Le cacaoyer est un arbuste originaire du Mexique domestiqué depuis environ 3 000 ans. Chaque cacaoyer est bisexué. Il produit de petites fleurs qui chacune présentent des organes mâles (étamines) et femelle (pistil). Un système appelé "d'incompatibilité" empêche généralement le cacaoyer de se féconder lui-même. Cependant, selon les variétés et les conditions, il arrive que, rarement, le cacaoyer se féconde lui-même (Lanaud, 1987). Les cabosses contiennent de nombreuses graines (entre 25 et 75) appelées fèves de cacao. La grande majorité des cacaoyers plantés chez les agriculteurs sont issus de ces graines. Des techniques de bouturage et de greffage existent mais restent encore peu utilisées par les agriculteurs. Le cacaoyer est à la fois femelle et mâle, et provient d’une mère et d’un père généralement différent. Chaque cabosse de cacao est issu d’une mère (le pied sur lequel a poussé la cabosse) et généralement de plusieurs pères (les autres cacaoyers dont le pollen a été apporté par le vent ou des insectes).


The cocoa tree is a shrub native of Mexico, domesticated there are about 3000 years ago. Each cocoa tree is bisexual. It produces small flowers that each have male organs (stamens) and female (pistil). A system called "incompatibility" generally prevents the cocoa tree to fertilize itself. However, depending on the variety and conditions, sometimes self fertilization may occur (Lanaud, 1987). The cocoa pods contain many seeds (25 to 75) called beans. The vast majority of cocoa trees planted in farmers come from these seeds. Cuttings and grafting techniques exist but are still little used by farmers. The cocoa tree is both female and male, and generally has a mother and a disntict father. Each cocoa pod has a mother (the foot which pushed the pod) and many fathers (other cocoa trees whose pollen was brought by the wind or insects).

Reference 
Lanaud, Claire. Nouvelles données sur la biologie du cacaoyer (Theobroma cacao L.): diversité des populations, système d'incompatibilité, haploides spontanés: leurs conséquences pour l'amélioration génétique de cette espèce. Diss. Paris 11, 1987.

Le cocotier - Coconut palm 
Par R. Bourdeix, 22 Avril 2016.
Le cocotier est un palmier originaire du Sud-Est Asiatique. Chaque cocotier est bisexué et produit des inflorescences tout au long de l'année. Chaque inflorescence porte à la fois des fleurs femelles et des fleurs mâles. Les cocotiers peuvent donc se féconder eux-même. La fréquence des autofécondations varie fortement selon le type variétal. La plupart des cocotiers de type Nains se reproduisent par autofécondation. Chez les cocotiers de type Grand, dans une inflorescence, tout ou partie des fleurs mâles mûrissent et tombent avant que les fleurs femelles ne deviennent réceptives. Le pollen qui féconde un cocotier provient alors généralement d'un autre cocotier. Il existe aussi des possibilités de fécondation entre les deux inflorescences successives d'un cocotier. Dans ce cas, sur un même arbre, le pollen de la nouvelle inflorescence va féconder les fleurs femelles de l'inflorescence d'avant (Bourdeix et al., 2015). En Côte d'Ivoire, les variétés plantées par les agriculteurs sont surtout des Grands et des hybrides entre Nains et Grands. Le cocotier est à la fois mâle et femelle. Chaque cocotier provient d'une mère et d'un père, le plus souvent différents. Un régime de coco provient d'une mère et de plusieurs pères.


The coconut palm is native from Southeast Asia. Each coconut is bisexual and produces inflorescences all throughout the year. Each inflorescence contains both female flowers and male flowers. Coconut palms can therefore self fertilize. The frequency of self-fertilization greatly varies depending on varietal types. Most Dwarf types reproduce by self-fertilization. In Tall-types, within the inflorescence, all or most of the male flowers ripen and fall before the female flowers become receptive. In this case, the pollen that fertilizes a palm generally comes another palm. There are also possibilities for fertilization between two successive inflorescences on the same coconut palm : the pollen of the new inflorescence will fertilize the female flowers of the former inflorescence (Bourdeix et al., 2015). In Côte d’Ivoire ; farmers are mostly planting Tall-Types and Dwarf x Tall hybrids. The coconut palm is both male and female. Each coconut comes from a mother and a father, most often distinct from the mother. A coconut bunch generally have a mother and several fathers.
Reference
Bourdeix R., Konan J.L. and N’Cho Y.P., 2005. Coconut. A guide to traditional and improved varieties. . Montpellier, France, Editions Diversiflora,104 p.

Le manioc
Article préparé par Paule, revu par Roland 26/04/2016
Agricultural Cassava is propagated by means of stem cuttings, which are known horticulturally as stakes. Thus, these clonal progenies are genetically identical to their mother plants. The cassava plant is bisexual. It bears inflorescences with separate male and female flowers. Within an inflorescence, female flowers open first ; only after they have been fertilized or have aborted, the male flowers open. So most of cassava seeds come from one mother and a distinct father. However, because flowering on a single plant extends two months, pollen from an inflorescence may fertilize female flowers from the former. In this rarer case self-fertilization occurs, so the mother and father is the same. The cassava seeds have a quite important dormancy. In Amazonie, ants bury seeds in their nests. This protects seeds from other predators and from lethal temperatures due to occasional fires and burning after field clearing. These fires break the dormancy of buried cassava seeds which germinate from ant’s nests (Pujol et al., 2002). Occasionally, traditional farmers select a few plants naturally growing from seeds for preparing stakes.



Pour planter le manioc, les agriculteurs utilisent des boutures de tiges. Ces descendances clonales sont génétiquement identiques à leurs plantes mères. Le plant de manioc est bisexué. Chaque inflorescence porte à la fois des fleurs femelles et des fleur males. Au sein d'une inflorescence, les fleurs femelles mûrissent en premier. Seulement après que les fleurs femelles aient été fécondées ou aient avorté, les fleurs mâles s’ouvrent. Ainsi, la plupart des graines de manioc proviennent d'une mère et un père distincts. Cependant, la floraison d’une seule plante s’étend sur près de deux mois : le pollen d'une inflorescence peut féconder les fleurs femelles de la précédente inflorescence. Dans ces cas plus rare, l’autofécondation se produit, de sorte que la mère et le père sont la même plante. Les graines de manioc ont une dormance assez importante. En Amazonie, les fourmis enterrent ces graines dans leurs nids. Cela protège ces graines d'autres prédateurs et des températures létales dues aux incendies accidentels et au brûlage après défrichement. Ces incendies lèvent la dormance des graines enterrées, qui germent à partir des nids de fourmis (Pujol et al., 2002). Les agriculteurs traditionnels sélectionnent parfois quelques plants sortis récemment de graines pour préparer leurs boutures.

Reference
Pujol, B., Gigot, G., Laurent, G., Pinheiro-Kluppel, M., Elias, M., Hossaert-McKey, M., & McKey, D. (2002). Germination ecology of cassava (Manihot esculenta Crantz, Euphorbiaceae) in traditional agroecosystems: seed and seedling biology of a vegetatively propagated domesticated plant. Economic Botany, 56(4), 366-379.

Trouvé par Roland in : L. Hedin. Culture du Manioc en Côte d’Ivoire : observations complémentaires sur la mosaique, 1931.

Les ébriés distinguent sept à huit variétés de Manioc (bede Poutou, bédé mango, bédé bro, bédé nana, etc…) qui diffèrent par leurs tiges ramifiées ou non, la coloration des pétioles, la coloration des feuilles, la couleur de la peau des tubercules, l’amertume de ces tubercules. Les variétés à tubercule amer sont particulièrement appréciées par les ébriés, pour la confection d’une farine cuite à la vapeur qu’ils consomment sous le nom d’attiéké. C’est également aec des variétés que les Mossous font leur boules de Toukpou, et les dahoméens, nombreux à Grand Bassam, leur Gari, farine de Manioc Grillée, et leur Plakaré. Par contre les Baoulés et les Gouros apprécient les variétés à tubercules sucrés, cultivée dans leur pays, notamment l’une d’entre elles reconnaissable à ses feuilles sessiles.
Note: il serait intéressant de voir ce qu'il reste 85 ans après de ces variétés.


Le palmier à huile - Oil Palm
Par Abiba , revu par Roland 26/04/2016.
Le palmier à huile est originaire de l'Ouest de l'Afrique. Bisexué, produisant tout au long de l'année, chaque palmier émet successivement une première série d'inflorescences ne comprenant que des fleurs mâles, puis une seconde série d'inflorescence ne comprenant que des fleurs femelles (Durand-Gasselin et al., 2002). Dans quelques rares cas, il arrive qu'une inflorescence bisexuée soit produite entre les deux séries. Ce cycle se répète jusqu'à la mort du palmier. Chaque palmier à huile est donc à la fois femelle et mâle. il provient d'une mère et d'un père, pratiquement toujours distincts. Un régime de palmier provient d'une mère et de nombreux pères. Dans la nature, le palmier à huile ne se reproduit pas végétativement. Les chercheurs ont cependant réussi à produire en laboratoire des clones qui restent pour l'instant peu diffusés chez les planteurs ; La reproduction de ces clones est alors analogue dans son principe à celle du bananier.



Oil palm is native to West Africa. Bisexual, producing throughout the all year, each palm emits successively a first series of inflorescences with only male flowers, and then a second series of inflorescences with only female flowers (Durand-Gasselin et al., 2002). In rare cases, a bisexual inflorescence occurs between the two male and female series. This cycle repeats until the death of the palm. Each oil palm is thus both female and male. It comes from a mother and a father, almost always distinct. A palm bunch comes from one female parent and many male parents. In nature, palm oil does not reproduce vegetatively. In their laboratories, researchers succeeded in producing clones, which remains rarely used by farmers. Reproduction of these clones is then similar in its principle to that of the banana.





Références

Durand-Gasselin, T., Cochard, B., Amblard, P., & De Franqueville, H. (2002). Un regard sur quarante ans d’amélioration génétique du palmier à huile (Elaeis guineensis) et son impact sur la filière. Le sélectionneur français, 53, 133-147.


Version prévue dans l'article mais finalement supprimée

Reproductive biology of the five crops studied: Botanists’ views

For understanding farmers’ views on crop reproductive biology, it seems useful to review shortly botanists’ views as a frame of comparison for the five studied crops.

Wild-type bananas contain a mass of hard peppercorn-sized seeds inside their little fruits, mostly inedible to humans. Occasionally, wild-type bananas have produced mutant offspring, which bore seedless fruits. Early humans started to reproduce the plant using the root offshoots, or “suckers,” which emerge from the corm mat at the base of the already emerged stems. Accidental hybridization between more or less distant relative species produced increasingly sterile and seedless cultivars (Perrier, 2009). Nowadays, domesticated bananas are asexually propagated as clones, and thus are genetically identical to the plant from which they originate. From a botanical perspective, a domesticated banana plant is neither female nor male, because it has lost its capacity of sexual reproduction.

In the rainforest, the wild cacao tree flowers irregularly. It commonly propagates itself by growing new trunks from its base. In plantations, most of the hundreds of flowers produced by each tree abort (NSW Botanic Gardens, 2016). These small flowers have both male and female organs, but an incompatibility system sometimes prevents self-fertilization (Lanaud, 1987). The cocoa pods contain many seeds called beans. The majority of cocoa trees planted in farms come from these seeds. Farmers rarely use cuttings and grafting techniques. The cocoa tree is both female and male. Cultivated forms generally have a mother and a father. Each cocoa pod has a mother and several fathers.

The coconut palm produces inflorescences with both female flowers and male flowers. Coconut palms can therefore self-fertilize, but frequency of self-fertilization greatly varies depending on varietal types (Bourdeix et al., 2015). In Côte d’Ivoire, farmers are mostly planting Tall-Types and Dwarf x Tall hybrids. For these varieties, each coconut comes from a mother and a father, most often distinct from the mother; within a bunch, coconuts generally have the same mother and several fathers.

Farmer’s propagate cassava by means of stem cuttings, known as stakes. Thus, these clonal progenies are genetically identical to their mother plants. The cassava plant bears inflorescences with separate male and female flowers. Most of cassava seeds come from one mother and a separate father. In rarer case self-fertilization occurs. In the Amazon basin, ants bury cassava seeds in their nests. Fires break the dormancy of these buried cassava seeds, which germinate from ants’ nests (Pujol et al., 2002). Occasionally, traditional farmers select a few cassava plants naturally growing from seeds for preparing stakes.

The oil palm emits successively a series of inflorescences with only male flowers, and then another series of inflorescences with only female flowers (Durand-Gasselin et al., 2002). This cycle repeats until the death of the palm. Each oil palm is thus both female and male. It comes from a mother and a father, usually distinct. A palm bunch comes from one female parent and many male parents. In nature, palm oil does not reproduce clonally. Researchers succeeded in producing in vitro clones which remain little used by farmers.